Un jour, Jésus priait à l'écart. Comme ses disciples étaient là, il les interrogea : « Pour la foule, qui suis-je ? » Ils répondirent : « Jean Baptiste ; pour d'autres, Élie ; pour d'autres, un prophète d'autrefois qui serait ressuscité. » Jésus leur dit : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Pierre prit la parole et répondit : « Le Messie de Dieu. » Et Jésus leur défendit vivement de le révéler à personne, en expliquant : « Il faut que le Fils de l'homme souffre beaucoup, qu'il soit rejeté par les anciens, les chefs des prêtres et les scribes, qu'il soit tué, et que, le troisième jour, il ressuscite. »
Dieu tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre, tu t’es fait tout petit, tu as pris notre condition humaine en Jésus-Christ, à l’exception du péché. Tu as voulu demeurer discret, pour nous montrer que la mesure de ta gloire de Père est l’humilité de Jésus.
1. « Pour la foule, qui suis-je ? » L’opinion de la foule au sujet de Jésus, rapportée par les disciples à l’issue de leur mission et de la multiplication des pains, nous montre un reflet trouble du visage de notre Seigneur, comme un résultat de sondage sur une vérité qui dépasse la simple capacité de l’intelligence humaine. De manière subtile et discrète, Jésus se donne à connaître comme Messie de Dieu, mais il évite habilement l’inversion des réalités révélées : ce n’est pas la glorieuse humanité qui devra être adorée en lui, mais sa divinité, humble et cachée, qui sera à vénérer et dont les caractéristiques seront à imiter. La foule avait mis son espérance en un Messie glorieux, populaire, couronné de succès, pour rétablir l’honneur du peuple. Avec Pierre, nous avons bien compris que le royaume, que Jésus annonce, n’est pas de ce monde : sa mission vise à rétablir les droits, l’honneur et la gloire de Dieu. Oui, Jésus est le Messie de Dieu, mais avons-nous saisi les conséquences de cette vérité ?
2. « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup ». La souffrance que Jésus annonce correspond aussi à un choix qu’il fait. Si Jésus renonce aux gloires humaines, c’est pour nous apprendre que sa divinité est justement à l’opposé des biens temporels. Pour être vraiment divin, son pouvoir n’a pas besoin du soutien de ce monde ; c’est plutôt le monde qui a besoin du soutien de Dieu ! C’est ce qu’exprime de manière subtilement ironique le livre de l’Ecclésiaste : il y a un temps pour tout et pour son contraire, et, en fin de compte, tout est vanité. Traduit en langage classique, le monde est éphémère, contingent : Dieu seul est nécessaire et son œuvre d’amour subsiste éternellement.
Dans cette optique, la messianité de Jésus ne dépend ni de l’opinion publique, ni du pouvoir politique, ni des richesses de ce monde, car tout cela est passager. Jésus en veut être libéré, affranchi ; il ne reste pas prisonnier des attaches de ce monde. Il donne sa vie, pour le rachat du monde de l’emprise d’esprits rebelles, comme ceux des anciens, des chefs et des scribes.
3. « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? ». Cette question n’est pas adressée à un groupe indistinct de disciples, ni à Pierre tout seul, qui a pourtant un rôle semblable à celui de « porte parole ». Elle est adressée à toi, lecteur de l’Évangile, âme appelée par le Christ, aimée par Dieu. Qui est Dieu pour toi ? Qui est Jésus dans ta vie ?
Si Jésus est une figure historique du passé, notre croyance n’est pas une foi vivante, mais une idéologie morte, parmi d’autres, dans le cimetière des théories qui veulent révolutionner le monde… Si Jésus est le Messie de Dieu, il l’est pour toute l’histoire de l’humanité ; son « être messie » n’est pas « momentané », mais présence perpétuelle, pour chacun, comme le soleil qui luit sur toute la prairie et qui impacte pourtant chaque brin d’herbe individuellement. Qui es-tu pour moi, Jésus ? De quoi me sauves-tu ?