En ce temps-là, Jésus prit la parole : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour votre âme. Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger. »
« Bénis le Seigneur, ô mon âme, bénis son nom très saint, tout mon être ! Bénis le Seigneur, ô mon âme, n’oublie aucun de ses bienfaits ! Car il pardonne toutes tes offenses et te guérit de toute maladie ; il réclame ta vie à la tombe et te couronne d’amour et de tendresse. » (Du psaume du jour : Ps 102, 1-4)
1. Contexte : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos ».
Il nous est possible de choisir la première ligne de cet Évangile pour décrire ce temps d’Avent dont l’humanité entière, juive et païenne, déchue, souffre sous le poids de ses histoires – ses péchés – en attendant la venue d’un Sauveur, qui sera Jésus-Christ, le Fils de Dieu incarné. C’est-à-dire que nous sommes toujours devant un texte évangélique provenant du ministère public de Jésus, tandis que notre Mère l’Église l’a choisi pour ce temps liturgique : l’Avent, le temps d’espérance qui précède l’arrivée du Messie au monde. Dès le péché originel d’Adam et d’Ève, l’homme et la femme, créés à l’image de Dieu (cf. Gn 1, 26), Dieu qui est amour (cf. 1Jn 4, 8), ont perdu l’amour de Dieu entre eux – avec toutes ses lourdes conséquences. La personne humaine se voit trop souvent orgueilleuse, violente, égocentrique, belliqueuse envers son prochain : l’ennemi de son « repos ». Ou pire, avec le masque d’un ami, avec le faux sourire d’un mannequin, elle dépeint des sentiments de respect, d’humilité, d’intérêt et de consolation envers le prochain, tandis qu’elle est trop prête à procurer le repos définitif au misérable qui le dérange en l’avortant gratuitement de sa vie, même avec une hygiène scrupuleuse. Néanmoins, Jésus ne s’inspire pas de l’esprit du monde, ni de ses guerres ni de ses mascarades pacifiques. Quand il propose le « repos », il sera la vraie paix, même si elle ne sera pas à la manière du monde : néanmoins, il veut que le cœur de ses disciples ne soit pas bouleversé ni effrayé (cf. Jn 14, 27). En revanche, sa bonté n’est pas le fruit d’une tiédeur sans passion ou d’un cœur de pierre qui coupe les relations humaines sans scrupule pour éliminer ainsi les conflits humains. Le Christ viendra au monde en pleine conscience de notre « fardeau » : il n’appellera pas « malades » l’homme et la femme qui souffrent leur lot de pécheurs sans s’identifier au médecin qui les guérit, parce qu’il prendra leur fardeau sur lui en les élevant. Le prophète Isaïe l’a attesté : « (Le Seigneur) rend des forces à l’homme fatigué, il augmente la vigueur de celui qui est faible. » (Is 40, 29) Cette promesse donc nous offre de l’espérance : nous serons sujets au « fardeau » d’être aimés par sa miséricorde quand Jésus assumera notre condition humaine, en nous rachetant du poids de notre existence mortelle qui veut récupérer la vie éternelle jaillissante de son Sacré-Cœur. Il sera le Médecin qui n’aura pas de honte à se « souiller » quand il guérit, en prenant sur lui l’argile de notre nature humaine dès la crèche, jusqu’à assumer la souillure de tous les péchés du genre humain sur la croix.
2. Composition de lieu : « Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour votre âme. »
Le « poids » du joug de Jésus se sentira à sa naissance quand tout le monde s’inclinera devant lui, fut-il roi, sage et puissant, fut-il simple berger impuissant. C’est le poids de Dieu le Père omnipotent « qui a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique (…) non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé » (Jn 3, 16-17) qui pèse sur notre misère avec sa miséricorde. Ou bien, dans les mots du prophète Isaïe, « Le Seigneur est le Dieu éternel, il crée jusqu’aux extrémités de la terre, il ne se fatigue pas, ne se lasse pas. Son intelligence est insondable. » (Is 40, 28) Nos esprits plieront aussi devant la sagesse miséricordieuse de la Sainte Trinité, en contemplant la vérité de l’Incarnation dans sa substance : dans la chair et le sang du bébé Jésus, doux et humble, né de la Sainte Vierge, Marie. Ce Roi des rois, ce Bon Berger, ne s’imposera pas sur nous plus qu’un enfant, même s’il va commander, « devenez mes disciples », et imposer cette indiction sur chacun de ses sujets, « prenez sur vous mon joug ». Il n’est pas un tyran pour nous faire souffrir ; il n’est pas le procureur d’une « douce mort » en facilitant l’extermination que nos péchés auraient méritée. Sa grâce est un don : ce qui sera notre repos. Son commandement n’est qu’une invitation : « venez à moi ». Mais que sentir sous son fardeau ? La joie de notre espérance trouvera l’accomplissement de cette prophétie d’Isaïe, « ceux qui mettent leur espérance dans le Seigneur trouvent des forces nouvelles ; ils déploient comme des ailes d’aigles, ils courent sans se lasser, ils marchent sans se fatiguer » (Is 40, 31) quand le chœur céleste chantera, « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’il aime. » (Lc 2, 14) De la crèche à la croix, il nous conduira de la terre au ciel où il nous élève.
3. Méditation : « Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger. »
Un jour Jésus va enseigner à ses disciples, « Amen, je vous le dis : celui qui n’accueille pas le royaume de Dieu à la manière d’un enfant n’y entrera pas. » (Mc 10, 15) Si la joie de Noël sera de témoigner le royaume de Dieu venu chez les hommes, cette grâce se présentera à la manière d’un enfant, Jésus : facile à porter, un fardeau léger. L’accueillir, l’imiter ne sera pas plus difficile que d’accepter de vivre comme lui : en tant que homme créé à l’image de Dieu, en tant que Fils de Dieu devant le Père, rempli par son Esprit. Est-ce que je sais me présenter devant les hommes avec la simplicité d’un enfant ? De n’être pour eux qu’un joug léger parce que c’est moi, celui qui est prêt à assumer le fardeau de leurs misères ? Est-ce que je sais éviter de faire la guerre et d’offrir une fausse paix en déshumanisant mes relations avec mes prochains ? Un roi majestueux ou un berger rude seraient-ils attirés à s’incliner devant ma douce humilité selon l’exemple du Christ ?