« Lequel d’entre vous, quand son serviteur aura labouré ou gardé les bêtes, lui dira à son retour des champs : “Viens vite prendre place à table” ? Ne lui dira-t-il pas plutôt : “Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, le temps que je mange et boive. Ensuite tu mangeras et boiras à ton tour” ? Va-t-il être reconnaissant envers ce serviteur d’avoir exécuté ses ordres ?
De même vous aussi, quand vous aurez exécuté tout ce qui vous a été ordonné, dites : “Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir.” »
Seigneur, je viens vers toi comme ton serviteur ; rends-moi la joie de vouloir ce que tu veux et d’expérimenter le bonheur de te servir.
1. Être serviteur.
Appeler quelqu’un « serviteur » semblerait être un gros mot dans un monde qui embrasse liberté, fraternité et égalité comme vertus suprêmes. Pourtant Jésus-Christ nous demande d’être serviteur, et va jusqu’à dire que le plus grand dans son Royaume est celui qui se met à servir les autres. Qu’est-ce qu’un serviteur ? Aristote dit que le serviteur (l’esclave) est « celui qui est destiné à obéir », à accomplir ses tâches sans voir tout l’ensemble. Le maître prévoit l’ensemble et distribue à ses serviteurs le travail à faire (Politique I). Si nous sommes serviteurs de Dieu, Dieu est donc le maître. C’est lui qui a prévu l’ensemble, qui prépare un projet, et qui nous distribue nos tâches. Notre rôle, comme serviteurs, est d’accomplir ce qu’il nous demande. Parfois, nous ne voyons pas la totalité de son projet ; nous réclamons « nos droits », comme si nous étions le maître. Sais-je vivre en tant que serviteur ? Est-ce que j’accepte parfois de ne pas tout voir, tout comprendre ? Ai-je la confiance que le Seigneur a prévu l’ensemble, que son projet est un projet d’amour pour moi et mes proches ?
2. « Lequel d'entre vous, quand son serviteur vient de labourer ou de garder les bêtes, lui dira à son retour des champs : 'Viens vite à table' ? » Jésus demande à ses disciples si un maître doit être reconnaissant envers ses serviteurs d'avoir exécuté les ordres reçus. Quelle réponse donnons-nous à cette question ? Il semble que nous soyons obligés de céder à la logique du Seigneur et d’admettre que le maître n’a pas un devoir de reconnaissance. Ceci dit, le Seigneur manifeste vraiment de la reconnaissance pour tout ce que nous faisons pour lui, à moins que nous ne nous contentions d’agir en mercenaire, qui exécute sa tâche sans y mettre le cœur. Si tel est le cas, nos tâches sont vidées de leur sens authentique et de ce qui produit de la joie. Comment est-ce que je fais ce que Dieu me demande ? En me plaignant ? En l’acceptant passivement comme un devoir ? Avec joie ?
3. Être ami.
Lors de la dernière Cène, Jésus nous parle de nouveau de la condition de serviteur. Il se met aux pieds de ses apôtres comme serviteur, et il leur explique ensuite de nouveau cette parabole du serviteur : « Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ignore ce que veut faire son maître ; maintenant, je vous appelle mes amis, car tout ce que j'ai appris de mon Père, je vous l'ai fait connaître ». (Jn 15, 12-15).
Dieu, le Maître, celui qui prévoit l’ensemble, nous donne une tâche. Elle est la même que la sienne : aimer jusqu’à donner nos vies. En accomplissant notre tâche nous devenons autre chose que serviteurs ; nous devenons ses amis. En tant qu’ami, il nous révèle tout son projet d’amour. Devenir ami ne nous donne pas le droit de s’asseoir tranquillement à table et d’attendre que d’autres nous servent. Désirer activement la même chose que l’ami, est une définition antique de l’amitié. Si nous sommes authentiquement amis de Dieu, nous ferons tout ce que nous pouvons pour réaliser son projet d’amour. Suis-je prêt à passer de la servitude à l’amitié ?