« Saisi par l’Un » (Captus ab Uno) Saint Bruno

mar 06/10/2015
Fête du jour: 
Saint Bruno, prêtre

Chapitre d'Evangile:

Verset de début: 
38
Verset de fin: 
42
Evangile: 

Chemin faisant, Jésus entra dans un village. Une femme nommée Marthe le reçut.
Elle avait une sœur appelée Marie qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
Quant à Marthe, elle était accaparée par les multiples occupations du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur m’ait laissé faire seule le service ? Dis-lui donc de m’aider. »
Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses.
Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. »

Prière: 

Sainte Trinité, que ma volonté, ma pensée et ma mémoire soient saisies par ta lumière au cours de cette méditation. Au nom du Père…

Demande: 
« Dieu qui a appelé saint Bruno à te servir dans la solitude, accorde-nous, par son intercession, qu’au milieu de l’agitation de ce monde nous sachions rester libres pour te suivre » (Prière collecte de la fête de saint Bruno).
Points de réflexion: 

1. Les belles coïncidences existent aussi dans la liturgie. Alors que nous entendons dans l’Évangile de ce jour « Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire » (Lc 10, 41-42) l’Église nous propose la mémoire de saint Bruno, prêtre et fondateur de l’ordre des chartreux. Les saints sont l’exégèse vivante de l’Évangile et saint Bruno nous offre un modèle concret d’une vie complètement tournée vers la seule chose nécessaire : Dieu. La spiritualité des chartreux – « abandonner les réalités fugitives et tenter de saisir l’éternel » (Fugitiva relinquere et aeterna captare) – nous invite à trouver l’équilibre entre Marthe et Marie, entre la contemplation et l’action. Nous ne sommes pas appelés à la vie monastique, mais au milieu du monde il nous faut constamment abandonner le regard fugitif de la mondanité, pour accueillir le regard éternel de Dieu sur les événements et les choses. Accueillir le regard de Dieu sur la réalité nous donne la liberté qui a permis au roi de Ninive de convoquer un jeûne national, de faire marche arrière pour revenir sur le chemin du Seigneur. C’est dans la prière et la contemplation que nous accueillons le regard de Dieu, car comme le rappelait le philosophe L. Wittgenstein « prier signifie sentir que le sens du monde est en dehors du monde ».

2. « En se retirant dans le silence et la solitude, l’homme, pour ainsi dire, s’expose au réel dans sa nudité, s’expose à ce ‘vide’ apparent, pour expérimenter au contraire la plénitude, la présence de Dieu, de la réalité la plus réelle qui soit, et qui est au-delà des dimensions sensibles. C’est une présence perceptible dans chaque créature : dans l’air que nous respirons, dans la lumière que nous voyons et qui nous réchauffe, dans l’herbe, dans les pierres ... Dieu, Creator omnium, traverse toute chose, mais il est au-delà, et justement pour cela, il est le fondement de tout » (Benoît XVI). Pour comprendre les paroles de Jésus, « une seule est nécessaire », l’homme contemporain doit retrouver le goût du silence, de se poser, de perdre et de prendre son temps dans la gratuité de la contemplation. Il s’agit du silence d’un temps de prière le matin, d’un temps d’examen de conscience le soir, d’une visite spontanée au Saint-Sacrement, mais aussi de l’attitude intérieure de qui se tait parce que tout lui parle de l’insondable mystère de Dieu : « La contemplation est d’autant plus éminente que l’homme sent en lui-même l’effet de la grâce divine et qu’il sait trouver Dieu dans les créatures extérieures » (saint Bonaventure).

3. Le silence qui nous fait découvrir Dieu comme fondement de la réalité est un élément essentiel de l’écologie intégrale comme nous le rappelle l’encyclique Laudato Si’. Ce silence, plus qu’une action est une « attitude du cœur, qui vit tout avec une attention sereine, qui sait être pleinement présent à quelqu’un sans penser à ce qui vient après, qui se livre à tout moment comme un don divin qui doit être pleinement vécu. Jésus nous enseignait cette attitude quand il nous invitait à regarder les lys des champs et les oiseaux du ciel, ou quand en présence d’un homme inquiet ‘il fixa sur lui son regard et l’aima’ (Mc 10, 21). Il était pleinement présent à chaque être humain et à chaque créature, et il nous a ainsi montré un chemin pour surmonter l’anxiété maladive qui nous rend superficiels, agressifs et consommateurs effrénés » (Laudato Si’).

Dialogue: 
Jésus, par l’intercession de saint Bruno, nous te demandons la grâce d’un esprit contemplatif au milieu de nos occupations. Que l’esprit de Marthe et de Marie habitent nos maisons, que nous soyons actifs pour servir, assidus à l’écoute de ta Parole ; que le service soit notre prière, que la prière soit notre service. Que par la prière nous puissions abandonner constamment le regard mondain posé sur les choses, les personnes, les événements pour accueillir tout avec ton regard d’éternité. Que notre prière remplisse de sens notre service, que notre service donne un sens à notre prière et qu’en tout instant notre cœur soit saisi par l’unique important : toi, notre Roi et Seigneur.
Résolution: 
Lire les numéros de l’encyclique Laudato Si’ qui parlent du regard de Jésus (nos 96-100).